Le rêve du poète
6 décembre 1906
Cette nuit j'ai fait un beau rêve
Inspiré des heures d'amour
J'ai ri et pleuré tour à tour
L'Extase est caresse si brève
J'ai vu sous la voûte des cieux
Un fantôme agiter des voiles
Et sa main cueillir les étoiles
Qui se reflétaient dans ses yeux
Le fantôme était une femme
Idéale par sa beauté
Sa prunelle avait la clarté
Des feux qui consument notre âme
Elle avait des ailes d'argent
Une robe en gaze légère
Phébé de sa pâle lumière
L'éclairait d'un rayon troublant
Et quand sa corbeille fût pleine
Elle quitta le firmament.
Pour se reposer un instant
Elle s'arrêta dans la plaine
Près d'elle j'osais m'approcher
Des pleurs sur sa face livide
Coulaient de sa paupière humide
Elle semblait souffrir d'aimer
Je lui dis serais tu la muse
Qui chante au silence des nuits
Pour les poètes ses amis
Parle j'ai deviné ta ruse
Elle répondit ne crois pas
Que je suis une folle amante
L'étoile est une âme vivante
Je la cueille pour le Trépas
Puis elle disparut dans l'ombre
Le mystère était expliqué
Chaque étoile dans sa clarté
Cache un dessein cruel et sombre
Je la vis s'enfuir vers les cieux
Le zéphir agitait ses voiles
Et sa main cueillait les étoiles
Qui se reflétaient dans ses yeux.
Honoré HARMAND