Plainte defendue.
Sonnet 40.
Non, je ne me plains pas qu' une si douce voix
Ait suborné mes sens, et mon ame enchantée ;
Ny qu' elle ait contre moy ma raison revoltée,
Et m' ait rendu captif, de libre que j' estois.
Non, je ne me plains pas qu' un langage courtois,
Qui pourroit arrester un muable prothée,
D' une douce esperance ait mon ame flattée,
Et me refuse un bien que je me promettois.
Non, je ne me plains pas, qu' une ame inexorable
M' estime plus heureux, plus je suis miserable ;
Et se vange sur moy du tort qu' elle me fait.
Je me plains seulement de ce qu' il me faut feindre,
Que je n' ay point de mal quand je souffre en effet,
Et qu' il me faut mourir sans que j' ose me plaindre.