Plainte sur une absence.
Sonnet 97.
Ce n' est plus moy qui suy les muses à la trace ;
Je mesprise le bruit que j' ay tant estimé,
Quand d' un desir de gloire ardamment allumé,
Je couronnois mon front des lauriers de Parnasse.
Ce n' est plus moy qui chante avecque tant de grace
Ces beaux yeux dont je fus si doucement charmé ;
Je ne sçay plus que c' est d' aimer, ny d' estre aimé,
Je ne sens plus en moy de flâme ny de glace.
Mais c' est moy, dont le coeur se plaint incessamment
Des estranges rigueurs de ce bannissement,
Qui trouble sans sujet mon repos ordinaire.
Faut-il que je reçoive, ô ciel le permets-tu !
L' injuste chastiment d' un crime imaginaire,
Pour le juste loyer d' une haute vertu ?